Page:Lemonnier - Adam et Ève, 1899.pdf/61

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tout comprendre à travers soi-même. Chaque homme recommence la vérité. J’étais, avec la nudité de ma chair dans ce bois, comme un symbole ; et maintenant une aimable enfant marchait à mes côtés dans les pelouses fleuries. Et je lui avais donné dans le secret de ma vie, le nom joyeux d’épouse.

Va à présent, homme régénéré et que cependant les autres hommes appelleront dément !

J’appelai donc Janille dans la maison et le chien fidèle ne me répondit, ni elle. Depuis un peu de jours elle recherchait le bois solitaire. Je croyais qu’elle y allait à cause du temps des bolets et des girolles. Chaque matin elle en rapportait des cueillettes parfumées et charnues. Le vin bleu des prunes aussi saignait ; la noisette déjà prenait un goût d’amande. L’été nous procurait des repas délicieux.

Or, l’ayant cherchée en vain, je pensai qu’elle était dans le bois et à mon tour je m’en allai sous les arbres, continuant à l’appeler par son nom. Je marchai ainsi un peu de temps et tout à coup j’entendis l’aboi du chien. Aussitôt le taillis ondula ; une forme en fuite