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panisque aux grâces animales lutinait près des fontaines avec ses petits, velus comme les boucs. Les temps, sous les cieux éternels, semblèrent renoués, la fraîcheur et l’innocence des âges où la créature vibrait des pulsations puissantes de la terre.

Alors, à cette image de la chair heureuse et lascive, égale dans l’amour et la maternité, les rage en moi tressaillirent. Ève ! Ève ! un petit amant avec sa bouche rose se pend à ta mamelle et moi à mon tour je veux être ton cher enfant, je veux boire la vie avec ton lait. Ève vit le désir dans mes prunelles et sourit, les yeux humides et lointains. Le vieillard s’était endormi, la barbe dans l’herbe, ayant travaillé tout le matin comme un laboureur. Et à présent nous étions seuls, elle et moi, comme Ève et Adam dans le paradis, avant la malédiction. Je touchai la pointe de son sein avec mes doigts. Je lui dis : « Femme, vois comme je te désire. » Mais encore une fois elle sourit, les yeux noyés, mi-évanouis dans la splendeur du jour ; et aussitôt après elle se remit à jouer avec Héli. Je sus ainsi