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son. Et maintenant, je pleurais des larmes délicieuses.

Le lendemain la neige tomba. Un duvet de cygne floconna comme de la plume pour le sommeil de l’enfant. Et ce-fut notre premier jour d’hiver, mais nous ne pensions pas à l’hiver. Une éternité battait dans le flanc d’Ève. Une vie à petits coups remuait aux sources de sa vie. L’hiver sembla une allégorie. Sous les frimas déjà obscurément tressaillait le bel Été. Les aériens rouets avec des fils de neige tissaient du silence blanc autour de son sommeil ; et puis le vent vernal sèmerait les anémones ; un enfant splendide bondirait par les chemins. Nos présages s’accordèrent avec les mythes aimés des âges. Ève ! Ève ! Toi aussi portes dans ton sein le divin enfant Été ; il viendra aux mois fleuris du soleil. Et voilà les fuseaux, voilà les draps blancs et les dentelles. Nous dédierons l’élu gracieux aux roses, aux fruits, aux aubes claires.

Je fermai la porte qui tout l’automne était restée ouverte. Je l’assurai contre la pluie