Page:Lemerre - Anthologie des poètes français du XIXème siècle, t4, 1888.djvu/479

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
453
LOUIS FRÉCHETTE.


De nos martyrs chrétiens immortelles rivales,
De dévoûments obscurs grands cœurs fanatisés,
Que la France d’alors jetait sans intervalles
               Sur ces bords incivilisés !

Dames de haut parage ou filles des chaumières,
Qui laissaient tout, famille, amis, brillants partis,
Pour venir apporter les divines lumières
               Aux petits d’entre les petits !

Et je rêvai longtemps ; car jamais, ô vieil arbre,
À nul fronton superbe, au seuil de nul tombeau,
Je n’ai rien vu, fouillé dans le bronze ou le marbre,
               De plus touchant et de plus beau,

Que celle qui porta le nom de La Peltrie,
Sainte veuve, enseignant, sous les ombrages frais,
Avec le nom de Dieu le grand mot de Patrie
               Aux petits enfants des forêts !





ANTE LUCEM




Qui pourrait raconter ces âges sans annales
Quel œil déchiffrera ces pages virginales
Où Dieu seul a posé son doigt mystérieux ?
Tout ce passé qui gît sinistre ou glorieux,
Tout ce passé qui dort heureux ou misérable,