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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.


Ayons pitié de nous ! Fuyons-nous, mon amie !
Mais souffre qu’en un rêve où sont mouillés mes yeux,
Je te revoie encor dans mes bras endormie
Et pose entre tes seins le baiser des adieux !


(Contes en Vers et Poésies diverses)


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AU JARDIN DU LUXEMBOURG



Cher et vieux Luxembourg ! — c’est vers cinquante-six
Que, dans les environs du palais Médicis,
S’étaient logés mes bons parents, dans la pensée
Que je serais ainsi tout proche du lycée
Dont alors j’étais l’un des mauvais écoliers ;
Et le jardin royal, aux massifs réguliers,
Aux vastes boulingrins de verdure qu’embrasse
Le gracieux contour de sa double terrasse,
M’accueillit bien souvent, externe paresseux.
Parmi mes compagnons j’étais déjà de ceux
Qui ne supportent pas la routine ordinaire
Et font sécher des fleurs dans leur dictionnaire ;
Et, poète futur, quand les rayons derniers
Du soleil s’éteignaient sous les noirs marronniers
Et que je m’attardais, rêveur au pied d’un arbre,
Il me semblait parfois que les dames de marbre,
Clotilde aux longs cheveux, Jeanne écoutant ses voix,
Et la fière Stuart et la fine Valois,
Me jetaient des regards et me faisaient des signes.
Parfois encore, auprès de la Maison des cygnes,
Quand les bateaux d’enfants, inclinant leurs agrès,