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LÉON DUVAUCHEL.

Quand revient la marée aux grands flots bondissants,
Risquent de voir briser leurs câbles impuissants.
Il s’agit d’abriter au pied de la falaise
L’esquif aventureux qui, vers la côte anglaise,
De harengs tout chargé, dut braver le gros temps.
Robustes, s’attelant à l’un des cabestans,
Elles sont là, courbant le dos, poussant la barre,
Tournant, tournant toujours, tirant la lourde amarre
Qui s’enroule et se tord comme une énorme vis.
Un homme les conduit, leur époux ou leur fils.
C’est sur ce bâtiment qu’il courut des bordées,
Qu’à travers le brouillard d’octobre et les ondées,
Sous le ciel de juillet aux midis étouffants,
Il est allé gagner le pain de ses enfants...
Bientôt, quittant le sable où s’enfonçait sa poupe,
Vers eux, péniblement, s’avance la chaloupe.

En vareuses de laine, en bonnets de coton,
En foulards achetés au chef-lieu de canton,
En tabliers de cuir, les jupes retroussées,
Montrant les gros bas bleus dont elles sont chaussées,
Sentant le goudron noir qui bout sur le charbon,
Ces femmes ont vraiment un air sauvage et bon.
Pour aider leurs amis, de leurs forces prodigues,
Jeunes, vieilles, parmi les lises et les digues
Vont ainsi chaque jour, par bandes, par troupeaux,
Et l’on entend de loin se heurter leurs sabots.


II

Quand arrive l’été, dans le riant cottage,
Dans le chalet princier dont le jardin s’étage,