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CHARLES GRANDMOUGIN.


Oui, je leur obéis ! Quand novembre est venu,
Toute joie est flétrie en mon âme dolente,
Je me sens envahi par un trouble connu,
Je suis sous le ciel gris fané comme la plante :

Oui, je me croyais grand quand j’étais amoureux;
Mes désirs m’entouraient d’une chaude atmosphère,
Un mirage trompeur m’était créé par eux,
Et je me suis trouvé sublime sans rien faire!

Mais je crie aujourd’hui : « Quand seras-tu dompté,
Stérile amour des bois, de la femme et des grèves ?
Ah! serez-vous jamais, insaisissables rêves,
Fixés par le génie ou par la volonté ? »

(Nouvelles Poésies)


À UN CHRIST EN CROIX

Toi dont la face pâle et toute renversée
Trahit éperdument les horribles douleurs,
Toi dont les yeux baignés par le sang et les pleurs
Reflètent une amère et poignante pensée,

Toi qui demeures seul sous ce grand ciel plombé
Que semble interroger ton désespoir suprême,
Toi qu’une âpre agonie a déjà rendu blême,
Du haut de quel beau rêve, ô Christ, es-tu tombé ?

Sens-tu soudainement que ton Père céleste
N’était rien qu’un fantôme éclos dans ton amour,
Et qu’à ton héroïsme impeccable il ne reste
Que la nuit sans aurore et la mort sans retour ?