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JEAN AICARD.


J’avais mis mon cœur dans une pervenche…
L’amour a bien ri, le sorcier moqueur !
Noir est le sorcier ; la magie est blanche…
J’avais mis mon cœur dans une pervenche :
Les pleurs d’une nuit ont noyé mon cœur.

J’avais mis mon cœur dans un bluet pâle…
L’amour est un rude et malin garçon,
Un dur moissonneur bronzé par le hâ!e…
J’avais mis mon cœur dans un bluet pâle :
Mon cœur fut fauché comme la moisson.

J’avais mis mon cœur dans la fleur des vignes…
L’amour vendangeur, qui chante en dansant,
Le vigneron ivre aux gakés malignes,
(J’avais mis mon cœur dans la fleur des vignes),
A foulé mon cœur, piétiné mon sang !

Je mettrai mon cœur dans ta main si bonne…
Il est blessé, faible, et prompt à souffrir…
Le garderas-tu ? Moi, je te le donne !
Tiens ! j’ai mis mon cœur dans ta main si bonne :
Garde-le, mignonne : il vient y mourir.

(Le Livre d’Heures de l’Amour)

L’INCONNU

Le roi marchait, suivi de toutes ses armées,
Seul, en avant de tous, magnifique et puissant,
Et son cheval, pieds hauts, narines enflammées,
Bondissait, et mordait le mors teinté de sang.