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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.


Le lion s’est levé… Pour la main qui le fouaille
Il n’a qu’un mépris nonchalant…
Comme un homme dirait : « Vous m’ennuyez ! » lui, bâille,
Et retombe sur l’autre flanc.

Car il sait, le lion, il sait qu’on le tourmente
Lâchement, en sécurité ;
Que la révolte est vaine, et sa force impuissante,
Qu’il n’est rien sans la liberté !

(Les Rébellions)

LE RHÔNE



Le Rhône est si profond, si rapide et si large,
Que dans la grande Europe il n’a pas son pareil.
Emportant des bateaux sans nombre avec leur charge,
Il va roulant de l’or et roulant du soleil.

Fleuve superbe ! il court, et, se jouant des lieues,
Il atteint, lui qui sort des Alpes au cœur pur,
La Méditerranée aux grandes ondes bleues,
Et, né dans la blancheur, il finit dans l’azur.

Un lac veut l’arrêter au sortir de sa source ;
Il le divise, il passe !… Et le frère du Rhin,
Trouvant alors des rocs en travers de sa course,
Sous l’obstacle étonné creuse un lit souterrain…

Reparais, reparais, tu n’auras plus d’obstacle :
Le grand peuple de France attend tes vastes eaux,
Ô fleuve ! donne-lui le merveilleux spectacle
Des prés féconds et verts, sillonnés de ruisseaux.