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MAURICE ROLLINAT.


Ils rendent plus doux, plus tremblés
Les aveux des amants troublés ;
Ils s’éparpillent dans les blés
          Et les ramures ;
Ils vont orageux ou follets
De la montagne aux ruisselets,
Et sont les frères des reflets
          Et des murmures.

Dans la femme où nous entassons
Tant d’amour et tant de soupçons,
Dans la femme tout est frissons :
          L’âme et la robe !
Oh ! celui qu’on voudrait saisir !
Mais à peine au gré du désir
A-t-il évoqué le plaisir,
          Qu’il se dérobe !

Il en est un pur et calmant,
C’est le frisson du dévoûment
Par qui l’âme est secrètement
          Récompensée ;
Un frisson gai naît de l’espoir,
Un frisson grave du devoir;
Mais la Peur est le frisson noir
          De la pensée :

La Peur qui met dans les chemins
Des personnages surhumains,
La Peur aux invisibles mains,
          Qui revêt l’arbre