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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.

Tes doigts ont meurtri son calice,
Pétale à pétale arraché,
Et tes yeux ont vu mon supplice
Sans que ton cœur en fût touché.

Et maintenant par toute plaine
Errent, sans parfum ni couleur,
Au gré mouvant de chaque haleine,
Les débris de mon âme en fleur.


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À LAMARTINE




Les voiles sont tombés : salut à ton image,
Lamartine ! La foule étreint ton piédestal,
Pour fêter de plus près, dans un plus tendre hommage,
Ton retour éternel à ton pays natal.

La tombe s’est ouverte, et la mort rend sa proie.
Parmi nous pour toujours te revoilà vivant.
Ton berceau s’illumine, et ta ville avec joie
Donne encore une fois le jour à son enfant.

Mais l’enfant cette fois n’est plus l’enfant fragile :
C’est l’homme au front superbe, au geste souverain,
Qui, laissant au tombeau sa dépouille d’argile,
Se lève tout à coup, fait de gloire et d’airain.

Plus de mort maintenant, plus de lente agonie.
Les partis se sont tus, et chacun à tes pieds,
Sur ce socle où d’en haut va planer ton génie,
Dépose le fardeau de ses inimitiés.