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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.


Pareille à du granit soyeux,
Sa barbe a des reflets d’aurore,
Et sa bouche est moulée encore
Sur un sourire de ses yeux ;

Ainsi qu’en ses fières estampes
Qui nous le rendaient à vingt ans,
Ses cheveux bouclés et flottants
Naissent en gerbes de ses tempes,

Et, séparés par le milieu,
Ils marquent déjà le sillage
De l’aile qui remporte à Dieu
Cette âme éprise de voyage.

À quel dieu ce front raffermi
Ne fait-il pas encore envie ?
Est-ce un mort que cet endormi
Qui se réveille de la vie ?

Que veut donc ce cercueil béant ?
Et son vainqueur, qui le lui livre ?
Qui jette en pâture au néant
Celui que la Mort laisse vivre ?

Vain combat ! Nous ne verrons plus
Cette face pâle et superbe,
Qui déjà défiait le Verbe
Dans le langage des Élus !

Voilé ! — Le drap encore ondoie !
De la tête aux pieds un sillon
Blanc se creuse! Le papillon
Est clos dans un cocon de soie !