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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.


Et puissent dans le ciel nos âmes voyager,
Comme les sons jumeaux de ces cloches paisibles,
Qui s’en vont deux à deux avec le vent léger
Vers les étoiles invisibles !

(Le Bleu el le Noir)



BRUNETTE



Voici qu’avril est de retour,
Mais le soleil n’est plus le même,
Ni le printemps, depuis le jour
Où j’ai perdu celle que j’aime.

Je m’en suis allé par les bois.
La forêt verte était si pleine,
Si pleine des fleurs d’autrefois,
Que j’ai senti grandir ma peine.

J’ai dit aux beaux muguets tremblants :
« N’avez-vous pas vu ma mignonne ? »
J’ai dit aux ramiers roucoulants :
« N’avez-vous rencontré personne ? »

Mais les ramiers sont restés sourds,
Et sourde aussi la fleur nouvelle,
Et depuis je cherche toujours
Le chemin qu’a pris l’infidèle.

L’amour, l’amour qu’on aime tant,
Est comme une montagne haute :
On la monte tout en chantant,
On pleure en descendant la côte.

(Le Bleu et le Noir)