Page:Lemerre - Anthologie des poètes français du XIXème siècle, t2, 1887.djvu/207

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
189
HENRI DE BORNIER.


PAYSAGE




Le soir tombe. Là-haut, sur les collines sombres,
Des saules et des pins jettent leurs grandes ombres ;
Sous la lune qui monte on distingue à demi
Les toits et le clocher d’un village endormi ;
Un passeur, détachant la barque de sa chaîne,
Lentement la conduit vers la rive prochaine…
Et mon rêve devine et je cherche des yeux
L’invisible passeur des âmes dans les cieux.




RÉSIGNONS-NOUS




Cest la saison des avalanches ;
Le bois est noir, le ciel est gris,
Les corbeaux dans les plaines blanches,
Par milliers, volent à grands cris ;
— Mais, bientôt, de tièdes haleines
Descendront du ciel moins jaloux,
Avril consolera les plaines…,
           Résignons-nous.

C’est l’orage ! Les eaux flamboient
En se heurtant comme des blocs,
Les dogues de l’abîme aboient
Et hurlent en mordant les rocs ;