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THÉODORE DE BANVILLE.


DIANE ET PALLAS


diane.




Fais comme moi. Courir dans les forêts profondes,
Au milieu d’un troupeau de filles vagabondes ;
Essuyer au matin les soleils aveuglants ;
Voir tomber sous mes traits des animaux sanglants ;
Entendre se mêler dans l’éclat des aurores
Les aboiements des chiens au cri des cors sonores ;
Puis, dans l’ombre furtive, au milieu des roseaux,
Quand j’ai lavé mes bras dans ses tremblantes eaux,
M’endormir aux chansons d’un fleuve, sur la berge,
Et savourer la joie immense d’être vierge,
C’est ma vie, ô douceur ! Courir seule en avant,
Sentir mon sein glacé par le baiser du vent ;
Enfin me coucher, lasse, après ma longue course,
Téter sauvagement la mamelle d’une ourse
Et me rassasier de son lait que je bois
Me plaît ; je vis mêlée avec l’horreur des bois,
Et toujours mon grand Arc, parmi les feuilles sèches,
Au but que j’ai choisi fait s’envoler mes flèches,
Car Vulcain de Lemnos, l’ouvrier diligent,
Sur sa pesante enclume en a courbé l’argent.


PALLAS.


Pour moi, c’est aux combats affreux que je m’élance.
Le casque resplendit sur mon front ; j’ai ma lance,
Et je me jette, ayant la rage dans mon flanc,
Au sein d’un tourbillon de carnage et de sang,