Page:Lemerre - Anthologie des poètes français du XIXème siècle, t2, 1887.djvu/156

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
140
ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.


OÙ DONC ?




Connaissez-vous, vertes Océanides,
Vous qui nagez dans les Océans bleus,
Vous qui dormez, sous les grottes humides,
Sur des fucus moins longs que vos cheveux ;

Vous qui chantez, de vos voix indécises,
Ces chœurs lointains, paisibles et charmants
Qui, chaque soir, sur les ailes des brises
S’en vont mourir vers les grands bois dormants ;

Connaissez-vous, reines des coquillages,
Des durs coraux et des tritons squameux,
Vous dont le pied foule toutes les plages,
Les antres frais et les rochers brumeux ;

Vous qui courez de l’équateur aux pôles,
Parlant d’amour aux oiseaux voyageurs,
Et qui fendez de vos blanches épaules
Les flots couverts par les algues en fleurs ;

Vous qui, perçant l’horizon de nos rêves,
Levez au ciel vos yeux étincelants,
Vous dont le souffle amène sur les grèves
Les naufragés aux cheveux ruisselants ;

Connaissez-vous sur la mer sans limite,
Vers le pays des désirs éperdus,
Aux régions que nul homme n’habite,
Bien loin du monde et sous des cieux perdus,