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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.


HYPATIE




Au déclin des grandeurs qui dominent la terre,
Quand les cultes divins, sous les siècles ployés,
Reprenant de l’oubli le sentier solitaire,
Regardent s’écrouler leurs autels foudroyés ;

Quand du chêne d’Hellas la feuille vagabonde
Des parvis désertés efface le chemin,
Et qu’au delà des mers, où l’ombre épaisse abonde,
Vers un jeune soleil flotte l’esprit humain ;

Toujours des Dieux vaincus embrassant la fortune,
Un grand cœur les défend du sort injurieux :
L’aube des jours nouveaux le blesse et l’importune :
Il suit à l’horizon l’astre de ses aïeux.

Pour un destin meilleur qu’un autre siècle naisse
Et d’un monde épuisé s’éloigne sans remords :
Fidèle au songe heureux où fleurit sa jeunesse,
Il entend tressaillir la poussière des morts.

Les sages, les héros se lèvent pleins de vie !
Les poètes en chœur murmurent leurs beaux noms ;
Et l’Olympe idéal, qu’un chant sacré convie,
Sur l’ivoire s’assied dans les blancs Parthénons.

Ô vierge, qui, d’un pan de ta robe pieuse,
Couvris la tombe auguste où s’endormaient tes Dieux,
De leur culte éclipsé prêtresse harmonieuse,
Chaste et dernier rayon détaché de leurs cieux !