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aussi vieux que le monde. Mais M. Zola ne l’avouera jamais ; il mourra sans l’avouer.

Pour en revenir à l’Oeuvre, si les artistes qu’on nous y montre ont peut-être les allures et le langage de ceux du second empire, ils ressemblent assez peu à ceux d’aujourd’hui. Ce sont des animaux disparus, des types reconstitués. Ils sont, dans leur genre, aussi éloignés de nous que les artistes chevelus et romantiques de 1830. Ils ont tous l’air de fous. Ils ont des gestes et des attitudes de maçons et de terrassiers allumés. Ils ne peuvent dire une phrase sans y mettre un « nom de D… ». Ils vocifèrent, ils « gueulent » tout le temps. Ils ont une fausse simplicité, une fausse grossièreté, un faux débraillé, une outrance bête, qui nous sont aujourd’hui insupportables. Ils parlent peinture ou littérature avec les mêmes cris, les mêmes tapes sur l’épaule, les mêmes yeux hors de la tête, et presque le même style que les ouvriers zingueurs discutant de leur métier dans la noce à Coupeau, ou qu’un garçon de l’abattoir expliquant les finesses de son art devant le comptoir d’un marchand de vin. «…Bongrand l’arrêtait par un bouton de son paletot en lui répétant que cette sacrée peinture était un métier du tonnerre de Dieu. » — « Ça y est, mon vieux, crève-les tous !… Mais tu vas te faire assommer. » — « Nom de Dieu… ! si je ne fiche pas un chef-d’œuvre avec toi, il faut que je sois un cochon. » — « Tiens ! le père Ingres, tu sais s’il me tourne sur le cœur, celui-là, avec sa peinture