Page:Lemaître - Les Contemporains, sér4, 1897.djvu/265

Cette page n’a pas encore été corrigée

sûr, et la certitude abolirait la beauté et la grandeur de son effort. On oublie toujours que, dans l’ordre moral, nous ne pouvons avoir de certitude proprement dite, mais seulement le désir ou plutôt le besoin que ce que nous jugeons le meilleur existe, — besoin dont l’intensité se traduit en affirmation. On peut dire qu’en ce sens M. Renan a toujours eu la foi ; mais cela n’a jamais été si évident que dans le rôle du prêtre de Némi.

Il est clair, en effet, qu’Antistius, c’est M. Renan lui-même, ou du moins qu’il est le porte-voix des sentiments dont M. Renan est le plus pénétré. L’accent du rôle suffirait à nous en convaincre ; mais nous avons le témoignage de M. Renan lui-même :

     «… Laissez ce doux rêveur finir tristement, demander pardon à
     Dieu et aux hommes de ce qu’il a fait de bien. Un jour, à un
     point donné du temps et de l’espace, ce qu’il a voulu se
     réalisera. À travers toutes les déconvenues, le pauvre Liberalis
     s’obstinera également dans sa simplicité. Métius, l’aristocrate méchant et habile, qui se moque de l’humanité, sera confondu, Ganeo sera pardonné avant lui… »

Ainsi M. Renan répudie nettement les opinions de Métius ; et même on peut trouver — chose absolument inattendue — qu’il est un peu dur pour ce sceptique élégant. C’est en cela surtout que consiste, à mon avis, le progrès décisif de M. Renan dans la foi. Car jusqu’à présent les personnages où l’on était autorisé à croire qu’il s’était incarné étaient toujours un composé d’Antistius et de Métius. Toutes les