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la ténacité tranquille de ses sentiments et de ses passions ; elle l’a montré amoureux du sol, âpre au travail et au gain, prudent, défiant, mais de sens droit, très épris de justice et ouvert au mystérieux…

Ce que nous devons encore à George Sand, c’est presque un renouvellement (à force de sincérité) du sentiment de la nature. Elle la connaît mieux, elle est plus familière avec elle qu’aucun des paysagistes qui l’ont précédée. Elle vit vraiment de la vie de la terre, et cela sans s’y appliquer. Elle est le plus naturel, le moins laborieux, le moins concerté des paysagistes. Au lieu que les autres, le plus souvent, voient la nature de haut, et l’arrangent, ou lui prêtent leurs propres sentiments, elle se livre, elle, aux charmes des choses et s’en laisse intimement pénétrer. Sans aucun doute, elle nous a appris à l’aimer avec une tendresse plus abandonnée, la Nature bienfaisante et divine qui apporte à ses fidèles l’apaisement, la sérénité et la bonté.

La bonté, c’est un des mots qui reviennent toujours avec elle. Un autre mot, tout proche, c’est celui de fécondité, d’abondance heureuse. Elle épanchait ses récits, d’un flot régulier, comme une source inépuisable, — mais presque sans plan ni dessein, ne sachant guère mieux où elle allait qu’une large fontaine dans les grands bois. Son style même, ample, aisé, frais et plein, ne se recommande ni par une finesse ni par un éclat extraordinaire, mais par