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bien, pour nous faire enrager, nous montrant les classiques aussi vivants que nous et découvrant chez eux une foule de choses que nous croyons avoir inventées.

M. Brunetière est très intelligent (je donne ici au mot toute sa force). Des adolescents le traitent de pion et disent : « Il ne comprend pas. » Au contraire, il est visible qu’il comprend toujours ; mais souvent il n’aime pas. Il a beaucoup d’aveux comme celui-ci : « Ce que l’on ne peut pas disputer au réalisme, naturalisme, impressionnisme, ou de quelque autre nom qu’on l’appelle, c’est qu’il n’y a de ressource, de salut et de sécurité pour l’artiste et pour l’art que l’exacte imitation de la nature. Là est le secret de la force, et là — ne craignons pas de le dire — la justification du mouvement qui ramène tous nos écrivains, depuis quelques années, des sommets nuageux du romantisme d’autrefois au plat pays de la réalité. » Il est vrai qu’après cela viennent les distinguo. Mais enfin, s’il a combattu un si beau combat contre les excès du naturalisme et du japonisme, ce n’est point qu’il ne saisisse parfaitement ce que sont ces nouveaux procédés de l’art, à quel sentiment, à quelle espèce de curiosité ils répondent, quel genre de plaisir ils peuvent donner. Il place ce plaisir assez bas et ne le goûte point, voilà tout. Il a, d’ailleurs, presque rendu justice à Flaubert et très exactement défini ce que Flaubert a pu apporter de nouveau dans le roman. Rien ne manque à cette étude, au moins en ce qui regarde Madame Bovary, que