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même : « Je suis fâché qu’Eugénie (sans doute une camarade) m’ait mal jugé ; elle est la première personne qui m’ait reproché le défaut de sensibilité. » Si, par sensibilité, elle entendait la tendresse, peut-être Eugénie ne se trompait-elle pas tant. Donc il s’amuse ; et il a des dettes, notamment une « dette d’honneur » qui se monte à cinq mille livres environ. Et M. Victor Giraud nous a raconté en détail comment, pour payer ses dettes, le chevalier de Chateaubriand plaçait des bas de fil, et même dans son régiment.

Dans ces conditions, M. de Malesherbes a dû le presser de partir et, si j’ose dire, l’expédier en Amérique, paternellement, comme on y expédiait souvent les mauvais sujets.

Donc il s’embarque à Saint-Malo au printemps de 1791. Il voyage avec l’abbé Nagot, supérieur de Saint-Sulpice et quelques séminaristes, qui vont à Baltimore. Un de ces séminaristes, l’abbé de Mondésir, interrogé cinquante ans plus tard, se souvient surtout des allures excentriques et tumultueuses et des « menteries incroyables » du chevalier de Chateaubriand, qui lui est apparu (on le sent) comme une espèce de fou. (Je vous renvoie encore à M. Victor Giraud, Nouvelles Études sur Chateaubriand.)

Le chevalier de Chateaubriand s’arrête, aux Açores (Santa-Cruz), aux îles de Saint-Pierre et de Miquelon. Il manque, paraît-il, de se noyer ou