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sur les opinions ne se borna pas à une résurrection momentanée d’une religion qu’on prétendait au tombeau… S’il y avait dans l’ouvrage innovation de style, il y avait aussi changement de doctrine… L’idée de Dieu et de l’immortalité de l’âme reprit son empire. » — « Le heurt que le Génie du christianisme donna aux esprits fit sortir le dix-huitième siècle de l’ornière, et le jeta pour jamais hors de sa voie… » Etc., etc. (Ce qui ne l’empêche pas, ensuite, de faire le dégoûté, l’homme revenu de toutes choses.)

Il peut y avoir du vrai dans ces vantardises : mais je trouve misérable de parler ainsi de soi-même.

Quelques années après la publication du livre, Senancour (qui n’était pas pressé et qui peut-être n’avait pas eu de quoi l’acheter au premier moment) fit une critique sérieuse et courtoise du Génie du christianisme. Senancour, vous vous en souvenez, dans ses Rêveries et dans Obermann, avait profondément défini ce mal de René que Chateaubriand décrivait avec un éclat superficiel. Senancour, parti comme Chateaubriand de l’incrédulité du dix-huitième siècle, continua à chercher tout seul, et parvint à un spiritualisme ardent, un peu mystique, à une sorte de théosophie. Il combattit de la façon la plus consciencieuse et la plus forte la fragile apologétique du Génie du christianisme. Mais, quoiqu’il eût raison, il avait tort, et Chateaubriand avait littérairement et socialement raison.

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