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Aussi n’avons-nous dans notre âme les idées de toutes choses, qu’en vertu de l’action continuelle de Dieu sur nous, c’est-à-dire parce que tout effet exprime sa cause, et qu’ainsi l’essence de notre âme est une certaine expression, imitation ou image de l’essence, pensée et volonté divine et de toutes les idées qui y sont comprises. On peut donc dire que Dieu seul est notre objet immédiat hors de nous, et que nous voyons toutes choses par lui ; par exemple, lorsque nous voyons le soleil et les astres, c’est Dieu qui nous en a donné et qui nous en conserve les idées, et qui nous détermine à y penser effectivement, par son concours ordinaire, dans le temps que nos sens sont disposés d’une certaine manière, suivant les lois qu’il a établies. Dieu est le soleil et la lumière des âmes, lumen illuminans omnem hominem venientem in hunc mundum ; et ce n’est pas d’aujourd’hui qu’on est dans ce sentiment. Après la sainte Ecriture et les Pères, qui ont toujours été plutôt pour Platon que pour Aristote, je me souviens d’avoir remarqué autrefois que du temps des scolastiques, plusieurs ont cru que Dieu est la lumière de l’âme, et, selon leur manière de parler, intellectus agens animae rationalis. Les averroïstes l’ont tourné dans un mauvais sens, mais d’autres, parmi lesquels je crois que Guillaume de Saint-Amour