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Consacraient les objets qu’avait touchés sa main.
Un fanatisme aimable à leur âme enivrée
Disait : « La femme est dieu, puisqu’elle est adorée. »
Ce culte dure encore ; on voit encor les cieux
S’ouvrir, se déployer, se voiler dans ses yeux.
Même au sein du sérail, qui la tient enfermée
Comme un vase recèle une essence embaumée,
Esclave souveraine, elle fait chaque jour
Porter à son tyran les chaînes de l’amour ;
Et sur nos bords, où, libre, elle peut sans alarmes
Décorer tous les lieux de l’éclat de ses charmes,
Soit que dans nos jardins, dans nos bois fréquentés,
Se promène au matin un essaim de beautés,
Soit que dans nos palais, quand la nuit recommence,
De belles à nos yeux s’étale un cercle immense,
Tous les cœurs attentifs ressentent leur pouvoir ;
Même sans les entendre on jouit de les voir ;
On goûte la douceur d’un trouble involontaire.
Mais ce sexe n’a-t-il qu’un seul moyen de plaire ?
Amour du monde, il joint à des dehors brillants
Un charme encor plus sûr, le charme des talents.

Aux sons harmonieux d’une harpe docile
Chloris a marié sa voix pure et facile :
L’œil tantôt sur Chloris, tantôt sur l’instrument,
On savoure à longs traits ce double enchantement.
Ses accords ont cessé, son maître la remplace.