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premières paroles manquaient-elles d’assurance. Cependant, à peine eut-il prononcé quelques phrases, qu’on le vit reprendre possession de lui-même et prendre, en même temps, possession de son auditoire. D’une voix grave, lente, mais bien audible, il commença son résumé, clair, précis, mesuré, écartant ou tournant les obstacles, supprimant les hors-d’œuvre et s’attachant à l’idée maîtresse, qu’il savait toujours saisir. Peu à peu sa voix s’échauffait, — sans pourtant perdre trop de la gravité que la circonstance lui imposait ; — le mot sonore, d’un timbre métallique, allait porter le trait dans tous les coins de la grande salle. Chacun écoutait, avec une surprise mêlée de plaisir, ce tout jeune homme qui s’affirmait déjà avec une réelle autorité et qui se dirigeait tranquillement, mais directement, vers son but, avec une sûreté de coup d’œil et une persistance de volonté peu ordinaires.

Je ne me rappelle plus quelle arme a finalement triomphé ; je crois même que nous avons eu tous quatre un peu gain de cause. Ce que je sais, c’est que, lorsque Mercier eut fini son résumé, il avait remporté un grand et légitime succès et laissait déjà entrevoir, pour l’avenir, une carrière distinguée.

Ceux qui l’ont suivi depuis cette époque savent comme il a largement tenu cette promesse.

Honoré Mercier descend d’une famille française qui est venue s’établir dans le district de Montmagny, et dont une branche est allée se fixer dans le comté d’Iberville. Son père, J. B. E. Mercier, et sa mère, Marie-Catherine Laflamme, demeuraient à Saint-Athanase. C’est là qu’il est né, le 13 octobre, 1840.

Après avoir fait son cours d’études au collège des RR. PP. Jésuites, à Montréal, il entra au barreau et commença à exercer sa profession en 1865, à Saint-Hyacinthe.

Mais il avait déjà débuté, trois ans auparavant, dans le journalisme et rédigeait le Courrier de Saint-Hyacinthe, qui défendait alors la politique de M. Sicotte, passé au parti de l’opposition. Cette courte notice ne permet pas d’entrer dans les détails de l’histoire politique de l’époque, à laquelle M. Mercier, tout jeune qu’il était, prit une part très active. Disons néanmoins que, dès 1864, au début de la discussion de la fédération des provinces, il combattit vigoureusement ce projet et dut même abandonner le Courrier, dont la direction ne partageait pas sa manière de voir.