Joueuses de kinnor, joueuses de sambuques,
Prêtresses de Babel aux lèvres de carmin,
Que, de leur rose orteil au cuivre de leurs nuques,
Voilent de longs cheveux doux comme le jasmin,
Avec leurs profils courts sculptés dans les chairs mates,
Leur regard irréel et cerné par le fard,
Leurs membres onctueux imprégnés d’aromates,
Leur bouche ivre d’amour, de lumière et de nard ;
Qui déroulent le soir, hurlantes et lascives,
Les danses de Tammouz dans les jardins royaux,
Et, sur leurs fronts cerclés de tiares massives,
Font tinter les shekels et les pesants joyaux.
La chaude volupté descend en longs effluves
Aux palpitations de leurs cils alourdis,
Les créneaux de Nimroud fument comme des cuves
Dans la torpeur du jour et des cieux engourdis ;
Pendant que le rayon qui joue entre les trames
Fait, dans chaque embrasure effrayante, fleurir,
Comme un lys somptueux, un doux groupe de femmes.
Et jusqu’aux pieds du Roi leur hymne vint mourir.
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