Page:Leblanc - Victor de la brigade mondaine, 1934.djvu/119

Cette page a été validée par deux contributeurs.
114
VICTOR, DE LA BRIGADE MONDAINE

II


Elle fut exacte au rendez-vous. En la voyant arriver, il dit, entre ses dents :

« Toi, ma petite, je te tiens. De fil en aiguille, j’arriverai bien à ton amant… »

L’air d’une toute jeune fille, allègre, impatiente d’action, heureuse comme si elle venait à une partie de plaisir, elle s’était transformée, sans pourtant se déguiser. Une petite robe de lainage gris, assez courte, une toque toute unie qui laissait à peine voir ses cheveux… rien en elle n’attirait l’attention. Elle n’avait plus son allure de grande dame, et sa beauté éblouissante était soudain devenue discrète, adoucie et comme voilée.

Victor demanda :

« Décidée ?

— Toujours décidée à m’échapper de moi.

— Quelques mots d’explication d’abord, dit-il.

— Est-ce nécessaire ?

— Ne fût-ce que pour calmer vos scrupules.

— Je n’en ai pas, dit-elle gaîment. Nous devons tout bonnement nous promener, n’est-ce pas ? et cueillir… je ne sais plus quoi.

— Exactement. Au cours de la promenade, nous rendons visite à un brave homme, qui exerce en réalité le vilain métier de recéleur… Avant-hier, on lui a remis un bracelet volé, qu’il cherche à vendre.

— Et que vous n’avez pas l’intention de lui racheter.

— Non. D’ailleurs il dormira… C’est un individu très régulier. Il déjeune au restaurant, rentre chez lui, et fait sa sieste de deux à trois. Sommeil de plomb.