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conque. Son intrigue inachevée avec Georges Lemercier ne le prouvait-il pas d’une façon péremptoire ?

Elle évitait de songer à la possibilité d’un amant, et par une hypocrisie inconsciente, elle appelait soif d’aventure l’irrésistible force qui l’entraînait vers la chute. Elle demandait à se distraire. La vie est triste, fade. Il faut l’agrémenter. Ne pouvait-elle trouver, sans faillir, un remède à son mal ?

Son corps aussi la tourmentait. Elle avait un gros chagrin à le voir si joli : « À quoi me sert d’être bien faite ? se dit-elle, je n’en jouis pas davantage que si j’étais vilaine et difforme. » Et elle eut des remords envers sa chair, comme envers quelqu’un auquel on refuse les satisfactions qu’il mérite.

Le dénouement approchait. Le premier homme qui l’eût sollicitée, l’aurait prise avec autant d’aisance que l’on prend une fille. Elle ne possédait aucune arme pour se défendre contre l’attaque. L’instinctive perversité de son tempérament, les théories de parrain, les exemples pernicieux, l’ennui, la curiosité, avaient accompli leur œuvre dissolvante. Elle ne pouvait se rattacher à rien, ni à son mari aveugle et trop honnête, ni à sa mère trop indifférente, ni à son fils qu’elle n’aimait pas suffisamment, ni à de fermes principes religieux ou moraux.