Page:Leblanc - Une femme, 1893.djvu/253

Cette page a été validée par deux contributeurs.

bas. De vieux coffres, des panetières et des buffets l’encombraient. Au fond bâillait une cheminée gigantesque où luisaient des cuivres.

Mme  Chalmin but du cidre, puis du cognac. L’intimité d’une pièce les gênait. Armand émettait des paroles intermittentes. Lucie rêvait.

Des souvenirs de roman surgissaient en son esprit. On y rencontre des femmes éprises de gentilshommes campagnards qui possèdent des châteaux historiques. À travers champs, à travers bois, elles se rendent auprès d’eux. Des arbres flambent dans l’âtre. Le vent siffle. La pluie pleure. Les étreintes des amoureux sont ardentes.

Elle observa Boutron. Il réalisait bien le type décrit. Mais pourquoi n’en jouait-il pas le rôle ? Ce visage indifférent, dont la bouche énonçait des syllabes qu’elle n’entendait point, l’impatientait, lui semblait en désaccord avec les choses environnantes, avec les circonstances, avec leur situation réciproque, avec ses songeries surtout.

Elle ne le désirait. Ses sens dormaient. Cependant il lui fallait cet homme. L’heure le voulait. Son état moral l’exigeait, et bien d’autres forces encore la dominaient, comme l’envie de vaincre les scrupules honnêtes de son compagnon.

Alors elle se leva, et lui posant les deux