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lité qui lui convenait. Elle manquait d’équilibre.

Cet équilibre, l’adultère le lui donna. Il mit en jeu toutes les facultés inoccupées de son être, combla les vides, aplanit les aspérités. Ses instincts qui, contrariés, la gênaient, assouvis, contribuèrent à sa santé générale. Pourvue d’un époux et d’un amant, elle remplit les exigences de sa double nature. L’harmonie fut rétablie.

Robert en eut le bénéfice immédiat. Son ménage recouvra cette belle tranquillité dont l’absence commençait à l’importuner. Les soins affectueux de sa femme ne se démentirent plus. Ils croissaient même en proportion des plaisirs extérieurs que goûtait Lucie. Après quelque débauche, elle appréciait mieux les avantages qu’il lui apportait.

C’est à cette époque que Robert reçut une lettre anonyme. On lui dénonçait l’intrigue de Mme  Chalmin avec un « très vieil ami ». Il la plia, la serra dans son portefeuille et conclut : « Lucie va bien rire ». Mais à midi un client arriva qu’on retint à déjeuner. Le soir, Mme  Ramel dînait. Robert oublia la lettre.

Il ne s’en souvint qu’une semaine plus tard, en triant ses paperasses. Cette fois, il y réfléchit : « Quelle chose abominable… tout de même, si je n’étais pas sûr d’elle, comme je me tracasserais ! »