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menace, ne suis-je pas grandi de toute cette réprobation ? Être incompris de ceux qui ne peuvent comprendre la bonté, l’indulgence, l’intelligence, n’est-ce pas une raison de croire que l’on est bon, indulgent et intelligent ? À Paris, je suis un monsieur quelconque.

Dans un salon, il y en a dix, vingt, qui sont ou qui paraissent supérieurs à moi. Dans cette ville, je suis le maître ; ma force s’égale à la force avec laquelle on m’exècre. Vraiment, je vous le dis, ce sont des sensations de triomphateur. Je sors d’ici comme on sort d’un bain, purifié, régénéré, vigoureux et intrépide. Si l’avenir ne réalise pas mes rêves, je reviendrai finir mes jours entre ces murs et j’aurai la consolation d’avoir vécu une vie très pleine, très noble, très généreuse, puisqu’on m’aura méprisé infiniment.

Il se tut. Ayant songé, je lui dis :

— Vous avez raison, le mépris des imbéciles est une cause légitime d’orgueil. Mais le mépris des autres, de ceux qui ont une conscience juste et claire, ne nous diminue-t-il point ?

— Ceux-là n’ont pas de mépris, me répondit-il.

Quelqu’un venait. Il se leva rapidement :