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lité de la façon la plus grave. Il vous faut donc à tout prix, et sur-le-champ, un coupable. Le coupable, ce sera donc moi. Comme charges, vous avez ma présence ici, le fait que la porte était fermée à l’intérieur, le fait que le brigadier Mazeroux dormait pendant le crime, et la découverte, dans le coffre, de cette turquoise. C’est écrasant, je l’avoue. Il s’y ajoute cette présomption terrible que j’avais tout intérêt à la disparition de M. Fauville et de son fils, puisque s’il n’existe pas d’héritier de Cosmo Mornington je touche deux cents millions. Parfait. Il n’y a donc plus pour moi qu’à vous suivre au Dépôt… ou bien…

— Ou bien ?

— Ou bien à remettre en vos mains le coupable, le vrai coupable.

Le préfet de police sourit ironiquement et tira sa montre.

— J’attends.

— Ce sera l’affaire d’une petite heure, monsieur le préfet, dit Perenna, pas davantage, si vous me laissez toute latitude. Et la recherche de la vérité vaut bien, il me semble, un peu de patience.

— J’attends, répéta M. Desmalions.

— Brigadier Mazeroux, veuillez dire au sieur Silvestre, domestique, que M. le préfet désire le voir.

Sur un signe de M. Desmalions, Mazeroux sortit.

Don Luis expliqua :

— Monsieur le préfet, si la découverte de la turquoise constitue à vos yeux une preuve extrêmement grave, elle est pour moi une révélation de la plus haute importance. Voici pourquoi. Cette turquoise a dû se détacher de ma bague hier soir et rouler sur le tapis. Or, quatre personnes seulement ont pu remarquer cette chute pendant qu’elle se produisait, ramasser la turquoise et, pour compromettre l’ennemi nouveau que j’étais, la glisser dans le coffre. La première de ces personnes est un de vos agents, le brigadier Mazeroux… n’en parlons pas. La seconde est morte. C’est M. Fauville… n’en parlons pas. La troisième, c’est le domestique Silvestre. Je voudrais lui dire quelques mots. Ce sera bref.

L’audition de Silvestre fut brève, en effet. Le domestique put prouver que, avant l’arrivée de Mme Fauville à qui il devait ouvrir la porte, il n’avait pas quitté la cuisine, où il jouait aux cartes avec la femme de chambre et un autre domestique.