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M. Desmalions resta pensif assez longtemps, puis objecta :

— Cependant, dans ces lettres écrites par lui, M. Fauville accuse sa femme.

— Certes.

— Nous devons donc admettre, ou bien qu’il avait raison de l’accuser, ou bien que les lettres sont fausses ?

— Elles ne sont pas fausses, tous les experts ont reconnu l’écriture de M. Fauville.

— Alors ?

— Alors…

Don Luis n’acheva pas sa réponse, et plus nettement encore, M. Desmalions sentit palpiter autour de lui le souffle de la vérité.

Les autres se taisaient, anxieux comme lui. Il murmura :

— Je ne comprends pas…

— Si, monsieur le préfet, vous comprenez, vous comprenez que si l’envoi de ces lettres fait partie intégrante de la machination ourdie contre Mme Fauville et contre Gaston Sauverand, c’est que leur texte a été préparé de manière à les perdre.

C’était un plafonnier…

— Quoi ! quoi ! Qu’est-ce que vous dites ?

— Je dis ce que j’ai déjà dit. Du moment qu’ils sont innocents, tout ce qui les accuse est un des actes de la machination.

Un long silence encore. Le préfet de police ne cachait pas son trouble. Il prononça, très lentement, les yeux fixés aux yeux de don Luis :

— Quel que soit le coupable, je ne connais rien de plus effrayant que cette œuvre de haine.

— C’est une œuvre plus invraisemblable encore que vous ne pouvez vous l’imaginer, monsieur le préfet, dit Perenna qui peu à peu s’animait, et c’est une haine que vous ne pouvez pas encore, ignorant la confession de Sauverand, mesurer dans toute sa violence. Moi, je l’ai sentie pleinement en écoutant cet homme, et, depuis, c’est à l’idée dominante de cette