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— Oui, monsieur, au reçu d’une dépêche qui la demandait en province, auprès d’un parent malade. Elle est revenue cette nuit.

— J’ai à lui parler. Envoyez-la-moi. Je l’attends.

— Dans le cabinet de travail de monsieur ?

— Non, en haut, dans le boudoir, auprès de ma chambre.

C’était une petite pièce du deuxième étage, jadis boudoir de femme, et qu’il préférait à son cabinet de travail depuis les tentatives de meurtre dont il avait été l’objet. Il était plus tranquille, plus à l’écart, et il y cachait ses papiers importants. La clef ne le quittait pas, une clef spéciale, à triple rainure et à ressort intérieur.

Mazeroux l’avait suivi dans la cour et s’attachait à ses pas, sans que Perenna, jusqu’ici, parût s’en rendre compte. Il prit le brigadier par le bras et l’entraîna vers le perron.

Il lui appliqua son poing sous le menton.

— Tout va bien. Je redoutais que Florence, soupçonnant quelque chose, ne fût pas rentrée. Mais, sans doute, ne pense-t-elle point que je l’ai vue hier. Maintenant, elle ne peut nous échapper.

Ils traversèrent le vestibule, puis montèrent au premier étage. Mazeroux se frotta les mains.

— Vous voilà donc raisonnable, patron ?

— En tout cas, me voilà résolu. Je ne veux pas, tu entends, je ne veux pas que Mme Fauville se tue, et, puisqu’il n’y a qu’un seul moyen d’empêcher cette catastrophe, je sacrifie Florence.

— Sans chagrin ?

— Sans remords.

— Donc, vous me pardonnez ?

— Je te remercie.

Nettement, puissamment, il lui appliqua son poing sous le menton.

Sans un gémissement, Mazeroux tomba, évanoui, sur les marches du second étage.

Il y avait, au milieu de l’escalier, un réduit obscur qui servait de débarras, et où les domestiques rangeaient les usten-