Page:Leblanc - Les Confidences d’Arsène Lupin.djvu/176

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ami, les instincts d’un petit rentier, et le respect de toutes les traditions et de toutes les autorités. Et c’est pourquoi Ganimard m’inspire beaucoup d’estime et de gratitude.

— Mais peu d’admiration.

— Beaucoup d’admiration aussi. Outre le courage indomptable, qui est le propre de tous ces messieurs de la Sûreté, Ganimard possède des qualités très sérieuses, de la décision, de la clairvoyance, du jugement. Je l’ai vu à l’œuvre. C’est quelqu’un. Connaissez-vous ce qu’on a appelé l’histoire d’Édith au Cou de Cygne ?

— Comme tout le monde.

— C’est-à-dire pas du tout. Eh bien, cette affaire est peut-être celle que j’ai le mieux combinée, avec le plus de soins et le plus de précautions, celle où j’ai accumulé le plus de ténèbres et le plus de mystères, celle dont l’exécution demanda le plus de maîtrise. Une vraie partie d’échecs, savante, rigoureuse et mathématique. Pourtant, Ganimard finit par débrouiller l’écheveau. Actuellement, grâce à lui, on sait la vérité au quai des Orfèvres. Et je vous assure que c’est une vérité pas banale.

— Peut-on la connaître ?

— Certes… un jour ou l’autre… quand j’aurai le temps… Mais, ce soir, la Brunelli danse à l’Opéra, et si elle ne me voyait pas à mon fauteuil !… »

Mes rencontres avec Lupin sont rares. Il se confesse difficilement, quand cela lui plaît. Ce n’est que peu à peu, par bribes, par échappées de confidences, que j’ai pu noter les diverses phases de l’histoire, et la reconstituer dans son ensemble et dans ses détails.