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Il se pencha sur l’homme, le palpa, et constatant qu’il n’était qu’évanoui, dit à l’infirmière :

— Vous le reconnaissez ?

— Non, affirma-t-elle.

— Vous êtes sûre ? Vous n’avez jamais vu, nulle part, cette tête-là ?

C’était une tête très grosse, à cheveux noirs et pommadés, à moustache grisonnante. Les vêtements, gros bleu, et de bonne coupe, indiquaient l’aisance.

— Jamais… jamais…, déclara la jeune femme.

Le capitaine fouilla les poches. Elles ne contenaient aucun papier.

— Soit, dit-il, en se relevant, nous attendrons qu’il se réveille pour l’interroger. Ya-Bon, attache-lui les bras et les jambes, et reste ici, dans le vestibule. Vous, les autres, les camarades, c’est l’heure de rentrer à l’annexe. Moi, j’ai la clef. Faites vos adieux à la maman, et trottez-vous.

Et lorsque les adieux furent faits, il les poussa dehors, revint vers la jeune femme, la ramena au salon, et s’écria :

— Maintenant, causons, maman Coralie. Et d’abord, avant toute explication, écoutez-moi. Ce sera bref.

Ils étaient assis devant le feu clair dont les flammes brillaient joyeusement. Patrice Belval glissa un coussin sous les pieds de maman Coralie, éteignit une ampoule électrique qui semblait la gêner, puis, certain que maman Coralie était bien à son aise, il commença tout de suite :

— Il y a, comme vous le savez, maman Coralie, huit jours que je suis sorti de l’ambulance, et que j’habite boulevard Maillot, à Neuilly, l’annexe réservée aux