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cornet, comme quelqu’un qui se rattache désespérément à un espoir confus.

— Allo… mademoiselle… c’est vous qui m’avez appelé au téléphone ? Vous avez entendu les cris ?… Allo ! allo !…

Personne ne répondait, il se mit en colère, injuria la demoiselle, sortit de la lingerie, rencontra Ya-Bon et le bouscula.

— Fiche le camp ! C’est de ta faute… Évidemment ! tu aurais dû rester là-bas et veiller sur Coralie. Et puis, tiens, tu vas y aller et te mettre à sa disposition. Et moi, je vais prévenir la police… Si tu ne m’en avais pas empêché, il y a longtemps que ce serait fait et nous n’en serions pas là. Va, galope.

Il le retint.

— Non, ne bouge pas. Ton plan est absurde. Reste ici. Ah ! pas ici, auprès de moi, par exemple ! Tu manques trop de sang-froid, mon petit.

Il le poussa dehors et rentra dans la lingerie qu’il arpenta en tous sens avec une agitation qui se traduisait en gestes irrités et en paroles de courroux. Pourtant, au milieu de son désarroi, une idée peu à peu se faisait jour : c’est que, somme toute, il n’avait aucune preuve que la chose se fût passée dans l’hôtel de la rue Raynouard. Le souvenir qu’il gardait ne devait pas l’obséder au point de le conduire toujours à la même vision et toujours au même décor tragique. Certes, le drame se poursuivait, comme il en avait eu le pressentiment, mais ailleurs peut-être et loin de Coralie.

Et cette première idée en amena une autre : pourquoi ne pas s’enquérir dès maintenant ?