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— On ne trahit que son pays, je ne suis pas Français.

— Vous êtiez Français, s’écria-t-elle. Vous avez demandé à l’être, et vous l’avez obtenu. Vous m’avez épousée, moi, une Française, et c’est en France que vous habitez, et que vous avez fait fortune. C’est donc la France que vous trahissez.

— Allons donc ! et au profit de qui ?

— Ah ! voilà ce que je ne comprends pas non plus. Depuis des mois, depuis des années même, le colonel, Bournef, tous vos anciens complices et vous, vous avez accompli une œuvre énorme, oui énorme, ce sont eux qui l’ont dit, et maintenant il semble que vous vous disputez les bénéfices de l’entreprise commune, et les autres vous accusent de les empocher, ces bénéfices, à vous tout seul, et de garder un secret qui ne vous appartient pas. En sorte que j’entrevois une chose plus malpropre peut-être et plus abominable que la trahison… je ne sais quelle besogne de voleur et de bandit.

— Assez !

L’homme frappait du poing sur le bras du fauteuil.

Coralie ne parut pas s’effrayer. Elle prononça :

— Assez, vous avez raison. Assez de mots entre nous. D’ailleurs, il y a un fait qui domine tout, votre fuite. C’est l’aveu. La police vous fait peur.

Il haussa de nouveau les épaules.

— Je n’ai peur de rien.

— Soit, mais vous partez.

— Oui.