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le lui enlevèrent aussitôt, car le chef se mit à ricaner :

— Oui, mon vieil Essarès, je puis te l’avouer, ta femme me plaît infiniment, et, comme je l’ai manquée cet après-midi, j’espérais bien, ce soir, aussitôt réglées mes affaires avec toi, en régler d’autres plus agréables avec elle. Sans compter qu’une fois en mon pouvoir, la petite me servait d’otage, et je ne te l’aurais rendue — sois-en sûr — qu’après exécution intégrale de notre accord. Et tu aurais marché droit, Essarès ! C’est que tu l’aimes passionnément, ta Coralie ! Et comme je t’approuve !

Il se dirigea vers la droite de la cheminée et, tournant un interrupteur, alluma une lampe électrique posée sous un réflecteur, entre la troisième et la quatrième fenêtre.

Il y avait là un tableau qui faisait pendant au portrait d’Essarès. Il était voilé. Le chef tira le rideau. Coralie apparut en pleine lumière.

— La reine de ces lieux ! L’enchanteresse ! L’idole ! La perle des perles ! Le diamant impérial d’Essarès Bey, banquier ! Est-elle assez jolie ! Admire la forme délicate de sa figure, la pureté de cet ovale, et ce cou charmant, et ces épaules gracieuses. Essarès, il n’y a pas de favorite, en nos pays de là-bas, qui vaille ta Coralie ! la mienne bientôt ! car je saurai bien la retrouver. Ah ! Coralie ! Coralie !…

Patrice regarda la jeune femme, et il lui sembla qu’une rougeur de honte empourprait son visage.