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complot préparé le matin contre la jeune femme et cette sorte de signal que révélait la pluie des étincelles ? Les deux faits annoncés par les deux interlocuteurs n’appartenaient-ils pas à la même machination ténébreuse ?

Les étincelles continuaient à scintiller là-bas.

Autant que Patrice Belval pouvait en juger, cela s’élevait du côté de la Seine, entre deux points extrêmes qui eussent été le Trocadéro, à gauche, et la gare de Passy, à droite.

- Donc, se dit-il, à deux ou trois kilomètres au plus à vol d’oiseau. Allons-y. Nous verrons bien.

Au second étage, un peu de lumière filtrait par la serrure d’une porte. Ya-Bon habitait là, et l’officier savait par la surveillante que Ya-Bon jouait aux cartes avec son flirt. Il entra.

Ya-Bon ne jouait plus. Il s’était endormi dans un fauteuil devant les cartes étalées, et, sur la manche retournée qui pendait à l’épaule gauche, reposait une tête de femme — une tête de la plus effarante vulgarité, dont les lèvres épaisses comme celles de Ya-Bon s’ouvraient sur des dents noires, et dont la peau grasse et jaune semblait imprégnée d’huile. C’était Angèle, la fille de cuisine, le flirt de Ya-Bon. Elle ronflait.

Patrice les contempla avec satisfaction. Ce spectacle affirmait la justesse de ses théories. Si Ya-Bon trouvait une amoureuse, les plus mutilés des héros ne pouvaient-ils pas prétendre, eux aussi, à toutes les joies de l’amour ?

Il toucha l’épaule du Sénégalais. Celui-ci