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dans la bibliothèque… Aura-t-il la possibilité de vous téléphoner ? Serez-vous là ?

»  Quoi qu’il en soit, il veut à tout prix vous avertir. Il demande donc la communication. Il l’obtient, vous appelle, entend votre voix, et, tandis qu’Essarès s’acharne à la porte, votre père, haletant, s’écrie : « Est-ce toi, Patrice ? Tu as la clef ? Et la lettre ? Non ? Mais c’est effrayant ! Alors tu ne sais pas… » Et puis un cri rauque, que vous entendez au bout du fil, et puis des sons incohérents, le bruit d’une discussion. Et puis la voix qui se colle à l’appareil, et qui balbutie, au hasard : « Patrice, le médaillon d’améthyste… Patrice, j’aurais tant voulu !… Patrice, Coralie. » Puis un grand cri… des clameurs qui s’affaiblissent… Puis le silence. C’est tout. Votre père est mort, assassiné. Cette fois, Essarès bey, qui l’avait manqué jadis, dans le pavillon, se vengeait de son ancien rival.

Don Luis s’arrêta. Sous sa parole véhémente, le drame ressuscitait. Le crime se perpétrait de nouveau devant les yeux du fils.

Patrice, bouleversé, murmura :

— Mon père, mon père…

— C’était votre père, affirma don Luis. Il était sept heures dix-neuf du matin, ainsi que vous l’avez noté. Quelques minutes après, avide de savoir et de comprendre, vous téléphoniez, et c’était Essarès qui vous répondait, le cadavre de votre père à ses pieds.

— Ah ! le misérable. De sorte que ce cadavre, que nous n’avons pas trouvé, et que nous ne pouvions pas trouver…

— Ce cadavre, Essarès bey l’a maquillé, tout simplement, maquillé, défiguré, transformé, et c’est ainsi, mon capitaine — toute l’affaire est là — que le Siméon Diodokis,