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de venir. Notre vieux Siméon vous réclame. Et le vieux Siméon a droit à des égards, en ce moment.

Puis se tournant vers le vieillard, il lui dit :

— Voilà ton fils, père dénaturé.



XIX.

La dernière victime de Siméon

Patrice entre, la tête bandée, car le coup que lui avait assené Siméon et le poids de la dalle avaient rouvert ses anciennes blessures. Il était très pâle et semblait souffrir beaucoup.

En voyant Siméon Diodokis, il eut un geste de colère effroyable. Pourtant il se contint. Plantés l’un en face de l’autre, les deux hommes ne bougeaient plus, et Lupin, tout en se frottant les mains, disait à demi-voix :

— Quelle scène ! quelle scène admirable ! Est-ce du bon théâtre, cela ? Le père et le fils ! Le criminel et la victime ! Attention, l’orchestre… Un trémolo en sourdine… Que vont-ils faire ? Le fils va-t-il tuer son père, ou le père tuer son fils ? Minute palpitante… Quel silence ! La voix du sang seule s’exprime, et en quels termes ! Ça y est ! La voix du sang a parlé, et ils vont se jeter dans les bras l’un de l’autre, pour mieux s’étouffer.

Patrice avait avancé de deux pas, et le mouvement annoncé par Lupin allait être accompli, les deux bras de l’officier s’ouvraient déjà pour le combat. Mais soudain, Siméon, affaibli par la souffrance, dominé par une volonté plus forte, s’abandonna et supplia :

— Patrice… Patrice… que vas-tu faire ?

Il tendait les mains, il s’adressait à la