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si. J’habitais alors une mansarde dans la maison où nous sommes. Je louai pour lui un logement qu’il vint habiter furtivement sous le nom de Siméon Diodokis, puisque Armand Belval était légalement mort, et où il demeura plusieurs mois sans sortir. Puis, sous son nouveau nom, et par mon intermédiaire, il racheta son pavillon. Et peu à peu, ensemble, nous avons creusé les tombes, celle de Coralie et la sienne. La sienne, oui, il le voulut ainsi, je le répète. Patrice et Coralie étaient morts tous deux. De la sorte, il lui semblait qu’il ne la quittait pas. Peut-être aussi, vous l’avouerai-je, le désespoir l’avait-il un peu déséquilibré… Oh ! très peu… seulement en ce qui concernait le souvenir et le culte de celle qui était morte le 14 avril 1895. Il écrivait son nom et le sien de tous côtés, sur la tombe et aussi sur les murs, sur les arbres et jusque dans les plates-bandes de fleurs. C’était votre nom et celui de Coralie Essarès…

» Et, pour cela, pour ce qui était de sa vengeance contre l’assassin, et pour ce qui était de son fils et de la fille de la morte… oh ! pour cela, monsieur, il avait bien toute sa tête, allez !

Patrice tendit vers lui ses poings crispés et son visage éperdu.

— Des preuves, scanda-t-il d’une voix étouffée, des preuves sur-le-champ. Il y a quelqu’un qui meurt en ce moment, par la volonté criminelle de ce bandit… Il y a une femme qui agonise. Des preuves !

— Ne craignez rien, dit M. Vacherot. Mon ami n’a qu’une idée, sauver cette femme et non pas la tuer…

— Il nous a, elle et moi, attirés dans le pavillon pour nous tuer, comme on avait tué nos parents…

— Il ne cherche qu’à vous unir, elle et vous.