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doute, de loin, reconnaître la démarche de Siméon.

»  Aussitôt, poursuite, Ya-Bon saute sur le pont de la péniche, et il arrive ici en même temps que les deux agresseurs, et avant qu’ils aient pu s’y enfermer. Quatre personnes dans cette pièce exiguë, en pleine obscurité, ce dut être une bousculade effrayante. Je connais Ya-Bon en ces cas-là, il est terrible. Par malheur, ce ne fut pas Siméon qu’il accrocha au bout de sa main qui ne pardonne pas, ce fut… ce fut cette femme. Siméon en profita. Il n’avait pas lâché Coralie. Il la prit dans ses bras, remonta, la jeta au haut des marches, puis revint fermer la porte à clef sur les deux combattants.

— Vous croyez ?… Vous croyez que c’est Ya-Bon, et non pas Siméon, qui a tué cette femme ?

— Certain. S’il n’y avait pas d’autres preuves, il y a celle-ci, cette fracture du larynx, qui est la marque même de Ya-Bon. Ce que je ne comprends pas, c’est la raison pour laquelle Ya-Bon, son adversaire hors de combat, n’a pas renversé la porte d’un coup d’épaule afin de courir après Siméon. Je suppose qu’il a été blessé et qu’il n’a pas pu fournir l’effort nécessaire. Je suppose aussi que la femme n’est pas morte sur-le-champ, et qu’elle aura parlé, et parlé contre Siméon, qui l’avait abandonnée au lieu de la défendre. Toujours est-il que Ya-Bon cassa les carreaux…

— Pour se jeter dans la Seine, blessé, avec un seul bras ? objecta Patrice.

— Nullement. Il y a un rebord tout le long de cette fenêtre. Il put y prendre pied et s’en aller par là.

— Soit, mais il avait bien dix minutes, vingt minutes de retard sur Siméon.

— Qu’importe, si cette femme a eu le