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La nuit va être dure. Je regrette bien que vous n’ayez pas dormi comme moi. Filons et, cette fois, je prends le volant. Ça va ronfler. Asseyez-vous près de moi, mon capitaine.

Ils montèrent tous deux dans l’auto, ainsi que le chauffeur. Mais, à peine sur la route, Patrice s’écria :

— Eh ! dites donc, attention ! Pas de ce côté ! Nous retournons sur Mantes et sur Paris.

— C’est bien ce que je veux, ricana don Luis.

— Hein ? Quoi ? Sur Paris ?

— Évidemment.

— Ah ! non non ! Cela devient un peu trop raide. Puisque je vous dis que les deux mariniers…

— Vos mariniers ? Des fumistes.

— Ils m’ont affirmé que le chargement…

— Le chargement ? Une charge.

— Mais enfin, le Chamois

— Le Chamois  ? Un bateau. Je vous répète que nous sommes roulés, mon capitaine, roulés jusqu’à la gauche ! Le vieux Siméon est un bonhomme prodigieux ! Voilà un adversaire, le vieux Siméon ! On s’amuse avec lui ! Il m’a tendu un traquenard où je m’embourbais jusqu’au cou. À la bonne heure ! Seulement, n’est-ce pas ? la meilleure plaisanterie a des limites. Fini de rire !

— Cependant…

— Vous n’êtes pas content, mon capitaine ? Après la Belle-Hélène, vous voulez attaquer le Chamois  ? À votre aise, vous descendrez à Mantes. Seulement, je vous en préviens, Siméon est à Paris, avec trois ou quatre heures d’avance sur nous.

Patrice frissonna. Siméon à Paris ! à Paris, où Coralie se trouvait. Il ne protesta plus, et don Luis continuait :

— Ah ! le gueux ! a-t-il bien joué sa par-