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cement et sans effort, vers une région heureuse.

Des minutes ou des heures coulèrent. Ils descendaient toujours, lui la portant par la taille, elle un peu renversée, les yeux clos et souriant. Il se souvenait d’images où l’on voit ainsi des couples de dieux qui glissent dans l’azur, et, ivre de clarté et d’air, il faisait de larges cercles au-dessus de la région heureuse.

Cependant, comme il en approchait, il se sentit plus las. Coralie était lourde, sur son bras plié. La descente s’accéléra. Les ondes de lumière s’assombrirent. Il vint un nuage épais, et puis d’autres qui formèrent un tourbillon de ténèbres.

Et soudain, exténué, de la sueur au front et le corps tout grelottant de fièvre, il tomba dans un grand trou noir…



XIV.

Un étrange individu

Ce n’était pas encore tout à fait la mort. En cet état d’agonie, ce qui persistait de sa conscience mêlait, dans une espèce de cauchemar, les réalités de la vie aux réalités imaginaires du monde nouveau où il se trouvait et qui était celui de la mort.

Dans ce monde, Coralie n’existait plus, ce qui lui causait un chagrin fou. Mais il lui semblait entendre et voir quelqu’un dont la présence se révélait par le passage d’une ombre devant ses paupières baissées.

Ce quelqu’un, il se le représentait, sans aucune raison d’ailleurs, sous l’apparence du vieux Siméon, lequel venait constater la mort de ses victimes, commençait par emporter Coralie, puis revenait vers lui, Patrice, l’emportait également et l’étendait quelque part. Et tout cela était si précis que Patrice se demandait s’il n’était pas réveillé.

Ensuite, il s’écoula des heures… ou des secondes. À la fin, Patrice eut l’impression