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« J’ai supplié Coralie… Elle s’est jetée à mes genoux. Elle veut mourir avec moi… »

Patrice observa la jeune femme. Il avait dit cela très bas, et elle n’avait point entendu.

Alors, il l’attira vivement contre lui, dans un élan de passion, et il s’écria :

— Tu vas partir, Coralie. Tu comprends bien que, si je ne l’ai pas dit tout de suite, ce n’est pas par hésitation. Non… seulement… je songeais à l’offre de cet homme… et j’ai peur pour toi… C’est épouvantable, ce qu’il demande, Coralie. S’il te promet la vie sauve, c’est qu’il t’aime… Et alors, tu comprends… N’importe, Coralie, il faut obéir… il faut vivre… Va-t’en… Inutile d’attendre que les dix minutes soient écoulées… Il pourrait se raviser… te condamner à mort, toi aussi, non, Coralie, va-t’en, va-t’en tout de suite.

Elle répondit simplement :

— Je reste.

Il eut un sursaut.

— Mais c’est de la folie Pourquoi ce sacrifice inutile ? As-tu donc peur de ce qui pourrait arriver si tu lui obéissais ?

— Non.

— Alors, va-t’en.

— Je reste.

— Mais pourquoi ? pourquoi cette obstination ? Elle ne sert à rien. Pourquoi ?

— Parce que je vous aime, Patrice.

Il demeura confondu. Il n’ignorait pas que la jeune femme l’aimât, et il le lui avait dit. Mais qu’elle l’aimât jusqu’à mourir à ses côtés, c’était une joie imprévue, délicieuse et terrible en même temps.

— Ah ! fit-il, tu m’aimes, ma Coralie… tu m’aimes…

— Je t’aime, mon Patrice.