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yeux gardaient-ils quelque mémoire. Il écrivit sur une feuille blanche les mots que Siméon avait dû contempler tant de fois :

Patrice et Coralie. — 14 avril 1895.

Le vieux regarda, hocha la tête, et recommença son petit ricanement douloureux et stupide. L’officier continua :

Armand Belval.

Toujours, chez le vieux, même torpeur. Patrice tenta l’épreuve encore. Il traça les noms d’Essarès et du colonel Fakhi, dessina un triangle. Le vieux ne comprenait pas et ricanait.

Mais, soudain, son rire eut quelque chose de moins enfantin. Patrice avait écrit le nom du complice Bournef, et l’on aurait dit que, cette fois, un souvenir agitait le vieux secrétaire. Il essaya de se lever, retomba sur son fauteuil, puis se dressa de nouveau et saisit son chapeau qui était accroché au mur.

Il quitta sa chambre et, suivi de Patrice, il sortit de la maison, et tourna sur la gauche du côté d’Auteuil.

Il avait l’air d’avancer comme ces gens endormis que la suggestion contraint à marcher sans savoir où ils vont. Il prit par la rue de Boulainvilliers, traversa la Seine, et s’engagea dans le quartier de Grenelle d’un pas qui n’hésitait jamais.

Puis sur un boulevard il s’arrêta, et, de son bras tendu, fit signe à Patrice de s’arrêter également.

Un kiosque les dissimulait. Il passa la tête. Patrice l’imita.

En face, à l’angle de ce boulevard et d’un autre boulevard, il y avait un café, avec une terrasse que limitaient des caisses de fusains.

Derrière ces fusains, quatre consomma-