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remercier des attentions qu’il a eues pour vous, et, enfin, le prier de se retirer.

Il se leva.

— Vous désirez le voir, maman Coralie ?

— Non, dit-elle. Je suis si lasse ! Si vous n’avez pas besoin de moi, interrogez-le seul à seul. Vous me raconterez ensuite…

Elle semblait épuisée, en effet, par cette émotion et cette fatigue nouvelles, ajoutées à toutes celles qui déjà rendaient si pénible sa vie d’infirmière. Le capitaine n’insista pas et sortit en ramenant sur lui la porte du salon.

Elle l’entendit qui disait :

— Eh bien, Ya-Bon, tu as fait bonne garde ? Rien de nouveau ? Et ton prisonnier ? Ah ! vous voilà, camarade ? Commencez-vous à respirer ? Ah ! c’est que la main de Ya-Bon est un peu dure… Hein ? Quoi ? vous ne répondez pas… Ah ! ça ! mais, qu’est-ce qu’il a ? Il ne bouge pas… Crebleu, mais on dirait…

Il laissa échapper un cri. La jeune femme courut jusqu’au vestibule. Elle rencontra le capitaine qui essaya de lui barrer le passage, et qui, très vivement, lui dit :

— Ne venez pas. À quoi bon ?

— Mais vous êtes blessé ! s’exclama-t-elle…

— Moi ?

— Vous avez du sang, là, sur votre manchette.

— En effet, mais ce n’est rien, c’est le sang de cet homme qui m’a taché.

— Il a donc reçu une blessure ?

— Oui, ou du moins il saignait par la bouche. Quelque rupture de vaisseau…